Voyage au pays de Folon (1934-2005)
14
Jan
2015
Par Pascale Ghislain 14 janvier 2015 Catégories Traditions et Folklore Pas de commentaires
Deux bronzes et 16 vitraux en Luxembourg belge
Jean-Michel Folon est né à Uccle, dans le Brabant wallon. Cet artiste belge est reconnu dans le monde entier. Il a touché à tout avec talent : la peinture, l’aquarelle, la gravure, la sculpture, la céramique, etc. Il s’est associé à des artisans remarquables pour créer des tapisseries, des vitraux, des bronzes.
Son univers est habité d’images simples qui deviennent des signes universels, compris de tous, quel que soit son origine ou son âge ou son statut social. On pourrait parler d’idéogrammes que l’on saisit de manière intuitive. Ses images expriment toute la poésie, la tendresse ou au contraire l’angoisse du monde contemporain.
En Luxembourg belge, vous pouvez découvrir 2 sculptures et 16 vitraux de cet artiste aussi touchant que renommé. « L’art ne reproduit pas le visible mais il rend visible » disait Paul Klee.
La rencontre entre l’art contemporain et l’art roman
L’histoire de Saint Etienne
Partons d’abord à la découverte de ces vitraux. Ils ont été créés pour une petite église romane du 11ème siècle, classée au Patrimoine Majeur de Wallonie, l’église de Waha. Une pierre dédicatoire que vous trouverez à l’intérieur du sanctuaire, confirme sa consécration par Théoduin, évêque de Liège de 1048 à 1075. Avant de passer le porche, un tilleul multicentenaire fait de l’ombre à une sculpture en pierre d’une autre artiste, Josia Gozdz. Cette sculpture représente un moine en prière, vêtu de sa bure, en situation de recueillement.
Revenons aux vitraux qui racontent l’histoire du martyre de Saint Etienne, patron de la paroisse. La vie d’Etienne est évoquée dans les actes des apôtres, il serait le premier martyr chrétien. Dans le récit de sa vie, Folon a retenu six thèmes :
- l’allaitement de l’enfant Etienne par une biche blanche
- la condamnation
- Etienne assisté par l’Esprit-Saint
- sa lapidation (grêle de pierres ressentie comme des flocons de neige)
- la couronne qui fait allusion à son nom grec (« stephanos »)
- la découverte des trois calices.
Ce dernier tableau se rapporte à la tradition selon laquelle on aurait retrouvé trois vases d’or dans le tombeau du saint martyr. Un seul avec des roses rouges pour authentifier sa sépulture.
La création
L’artiste s’est associé à des maîtres verriers de Chartres, l’atelier familial Loire à Lèves, pour la réalisation de ces vitraux. Son talent d’aquarelliste, maniant avec subtilité transparence et harmonie des couleurs, est sublimé dans ces vitraux. L’atelier Loire est une référence en la matière et est appelé sur d’importants chantiers en France et à l’étranger.
L’oiseau, symbole cher à Folon
Dix autres vitraux représentent les célèbres oiseaux de Folon qui évoluent dans un ciel bleu. « Si je n’avais pas été un homme, j’aurais voulu être un oiseau » avouait-il souvent. L’oiseau est un symbole de liberté, une incitation au voyage et c’est aussi un messager. Chez Folon, l’homme se métamorphose souvent en oiseau.
Tout le monde se souvient de l’homme vêtu d’un long manteau et coiffé d’un chapeau qui sera popularisé par le générique de la télévision française, Antenne 2. Un autre grand artiste poète et musicien, Yves Duteil, a évoqué les dessins de Folon dans une chanson. Dans l’église de Waha, un montage audio-visuel présente le témoignage de Folon qui évoque l’étroite collaboration entre artiste et artisan dans cette création.
Le « Maître de Waha »
Un court reportage complémentaire évoque aussi le mobilier de l’église romane dont des sculptures en bois polychrome sont attribuées au « Maître de Waha ». Pour obtenir plus d’explications encore sur ce mystérieux artiste du 16e siècle, il faut vous rendre au Musée de la Famenne à Marche. Vous y verrez de plus, une belle collection d’objets mérovingiens mis au jour à Wellin ou à Hamoir.
Le musée nous plonge également dans le vécu des Famennois, à leurs heures de gloire ou de misère. Une maquette à l’échelle 1/300ème restitue la ville de Marche vers 1.600. Plus d’infos sur www.musee.marche.be.
Des sculptures de Folon dans la province
A Marche
Deux sculptures en bronze de Folon sont aussi à voir à Marche et à Neufchâteau. Jean-Michel Folon s’aventure dans la troisième dimension vers 1990, en partant d’objets trouvés et détournés. Les arts d’Asie ou d’Amérique centrale l’imprègnent. Il sculpte des serpents, des oiseaux, des femmes-oiseaux dans des poutres en bois. Mais il s’aperçoit que ces totems ne résistent pas aux intempéries.
Alors sur les conseils de son ami, le sculpteur César, il se tourne vers le bronze qu’il patinera pour rappeler la fibre de bois. De plus, la lumière et son reflet sur la sculpture est essentiel pour l’artiste car « sculpter, c’est tendre des pièges à la lumière » disait-il, ou encore « à l’extérieur, les sculptures vivent … d’une vie libre et les gens les chargent d’intentions… de pensées ».
Folon préfère que ses œuvres se voient en pleine nature, là au fil des saisons, elles commencent leur propre vie. Une vie qui s’enrichit du regard de tous. A Marche, rue Neuve, son « homme au chapeau » s’appelle « Loin ». Cette figure est emblématique de l’œuvre de Folon.
A Neufchâteau
Folon se rend dans la ville de Neufchâteau en 1988, à la demande d’un comité Unicef local qui va y organiser une grande fête intitulée « les 1000 jardins du désert ». Folon est un tendre défenseur des causes altruistes : il revendique les droits de l’homme, les minorités, l’environnement. Le projet des « 1000 jardins du désert » est destiné à récolter des fonds pour implanter des oasis dans le désert du Tchad.
En souvenir de cette belle organisation, reste une statue-fontaine acquise par la ville et qui s’intitule « La fontaine aux poissons ». Les sculptures de Folon dialoguent souvent avec l’eau. Il crée des fontaines qui donnent à boire aux oiseaux, des parapluies d’eau qui protègent de la pluie. La « fontaine aux poissons » joliment implantée dans un jardin de la vallée du lac, renvoie à l’enfance, aux journées de pêche de l’artiste avec son frère Christian.
Un autre projet, la création d’un verger expérimental pour la conservation d’espèces fruitières indigènes à Tronquoy, a lui aussi été élaboré dans le cadre de cette journée UNICEF du 11 septembre 1988 à Neufchâteau. Ce verger est didactique, ne manquez pas de le visiter, vous en apprendrez beaucoup sur la culture fruitière, depuis la plantation, la taille, la greffe, les maladies, les variétés résistantes…Un rucher a été installé pour une fécondation optimale.
Un livre édité par la province de Luxembourg vous permettra d’aller à la rencontre des artistes contemporains et de leurs œuvres implantées dans les parcs, sur les places et les ronds-points du Luxembourg belge. Infos : v.courtoy@province.luxembourg.be, +32(0)63/21 27 15